Chapitre 5: LES OPÉRATIONS

 

La spécialité des matériels de parachutage et de largage pour le montage d'une tente atelier TD2 en Macédoine.

  • Témoignage de Didier GRELIER (Coin's 94).
D'aucuns se diront, voire diront: « Pourquoi l'ADC GRELIER, le MCH VAN DE WINCKELE, les BCH COUDERC et MOREIRA sont partis à 2000 km, pendant six semaines, uniquement pour monter des tentes? »
  • Alors, ces tentes ?
45 m de long, 11,5 m de large et 6,5 m de haut, d'un poids unitaire de 12 tonnes. Vous avez deviné, c’étaient des tentes hangars TD2 F1. Elles sont loin de ressembler à des tentes modulaires ou à des tentes de DECATHLON puisqu'elles nécessitent la participation active et simultanée de cinquante deux personnes. Alors nous quatre et nos petits bras musclés n'y auraient pas suffi, même en six semaines!
Ensuite il y avait deux tentes à monter et nous étions onze (non pas quatre ), car intégrés dans un détachement BOMAP qui comprenait:1 officier, 3 sous-officiers et 3 parachutistes. Mais pour des raisons d'éthiques il ne sera plus fait mention des personnels de la BOMAP, car c'est notre vision des faits qui est relatée ici.
  • Aussi loin ?
À KUMANOVO, deuxième ville de MACEDOINE avec 180 000 habitants, sur un petit aérodrome macédonien qui servait de paraclub, appelé "AIR FIELD "ou "AGTP"[se prononce: adjétépé] pour les chauffeurs de taxi et la population locale.
Centre de déploiement du dispositif aéromobile « EXTRACTION FORCE », on trouve sur place: 8 PUMA, 4 GAZELLE et environ 250 personnels en majorité du 3
ème R.H.C.
À l'origine ces tentes devaient servir d'ateliers de maintenance aéronautique. Mais les événements les ont transformés en « hôtels de campagne » puisqu'une tente sert de logement à la 1ère compagnie du 17ème RGP et l'autre à un escadron du 1er RHP de Tarbes.
  • D'où venaient ces tentes?
Construites vers 1950, certaines ont été déployées en Indochine, puis en Algérie. L'une des deux tentes, construite en 1948, avait été expédiée à Blida en Algérie (1960), puis revenue à Montauban en 1962. Elle a été réparée, remise à hauteur puis conditionnée pour être stockée en 1966 à Saint-Astier, d'où nous l'avons réveillée pour l'amener en Macédoine en 1999.
L'autre tente est beaucoup plus jeune puisqu'elle n'a été stockée à Saint-Astier qu'en 1970!
  • Aussi longtemps ?
Six semaines ont été nécessaires car les tentes n'étaient pas là le jour de notre arrivée. Elles ont quitté Marseille le 20 janvier et nous sommes arrivés le 27 janvier 1999. D'autre part, elles devaient être montées sur une dalle en béton de 44 X 72 m (ce que nous ignorions au départ!).La dalle n'était pas finie de couler. Il a fallu attendre une semaine de séchage avant de pouvoir marcher sur la dalle.
Les tentes sont arrivées sur le camp le dimanche 7 février, soit trois jours avant la fin théorique de la mission! Problème technique de fixation pour des tentes sur une dalle en béton (personne pour nous indiquer les bons systèmes, où les trouver, avec quoi percer, etc.). Les personnels du 3
ème RHC étaient persuadés que nous savions que les tentes devaient être montées sur du béton et que nous aurions dû venir avec les systèmes de fixation!
  • Comment c'est passé le montage ?
Le chef de détachement a dû tout démarcher: tiges filetées , puis systèmes d'ancrages, mèches. En bref, il a fallu régler au mieux tout un éventail de problèmes qui n'étaient pas forcément de notre compétence , de notre niveau ni de notre responsabilité. Les conditions climatiques (vent parfois très violent, neige, gel)nous ont parfois retardés et seront dans le futur des causes importantes de détériorations des entoilages. Ils ont aussi donné lieu à des haubanages de fortunes, car initialement, ce n’est pas prévu par le constructeur.
En cours du montage de la première tente, nous avons dû faire face à un problème de rupture de stock des systèmes d'ancrages (plus aucun goujon sur le territoire macédonien, ni en Grèce qui est le pays transitaire obligatoire pour le commerce macédonien ). À moins de 300 jours de l'an 2000 ,nous ne trouvions pas de  systèmes d'ancrage! On avait l'impression d'être sur une autre planète ! D’où l’investissement personnel du chef de détachement auprès d'un camarade français pour se faire expédier, à ses frais, un système similaire.
Comme nous n’avions pas assez de soucis, de nouvelles contraintes se sont rajoutées la semaine huit:    400 personnels supplémentaires à loger  dont 250 sous les deux TD2, visite et allocution télévisée du président de la République sous les deux tentes pour le dimanche 28 février! Il a donc fallu accélérer le mouvement et mettre les bouchées doubles!
?Enfin, la mission fut terminée le jeudi 25 février, pour les deux tentes. Le lundi 1er mars a été consacré au montage des trois tentes atelier TD 6 (livrées depuis le 22 février).
  • Quelles ont été vos conditions de vie sur place ?
Après un accueil plutôt rugueux, le jour de notre arrivée le 27 janvier, (4 h du matin, nuit blanche depuis notre départ le 26 à 14 h, baladés d'un cantonnement à un autre, se faire jeter de partout, s'entendre dire que les bérets rouges auraient pu choisir un autre moment pour venir monter des tentes dont on se fiche. ,   qu'il y a -11°C dehors, et -10°C dans le car qui nous a fait traverser la Grèce puis la Macédoine, l'incident diplomatique était certain, heureusement que tout s'est arrangé très vite!) l'ensemble des conditions de vie (nuit, jour, alimentation, hygiène, déplacement) était plus que satisfaisant compte tenu des contraintes locales.
Le vendredi 28 janvier, histoire de nous montrer ce qui nous attendait, le vent faisait des pointes à 180 km/h, la température tombait à -28°c. Le pied, quoi  ! Heureusement, personne, dans le détachement n'était frileux, quoique à y réfléchir, j'ai souvent entendu: « on se les pèle, ici ».
  • Et à part çà ?
Eh bien, justement à part çà, rien. Alors qu'on aurait pu profiter de ces 15 jours d'attente pour chercher des tiges filetées, trouver des solutions à différents problèmes , non nous n' avons fait qu'attendre! Inutile de dire que nous  sommes devenus maîtres à la belote, crapette et autres tarots". Nous avons pu aussi faire des emplettes à KUMANOVO, manger au restaurant, bref, faire du social avec l'environnement! Les missions avaient été préparées à l'avance:ainsi il était prévu que je reste comme « otage à la pizzeria BISSER » où j’aurai donné des leçons de français à la serveuse!
Nous avons aussi visité, bien entendu, SKOPJE à une demie-heure de route en autocar local (mémorable!). Pour nous retrouver dans cette ville où personne ne nous comprend, nous avions acheté un plan de la ville. Surprise, il est à l'image de leur écriture:inversé! En effet, le Sud est en haut de la carte. Nous avons marché pendant deux heures, épuisé la patience de trois taxis avant de regarder l'orientation du plan et de comprendre. Tiraillés par la faim nous n'avons trouvé que le Mac Donald pour nous restaurer ! Nous nous sommes retrouvés avec les brigadiers-chefs qui avaient choisi de visiter la vieille ville de SKOPJE.
Pays d'imitation, sans manufactures propres, nous n'avons rien ramené, car tout étant copié nous risquions les plus graves ennuis avec les douanes, lors de notre retour en FRANCE!
Retour le soir vers 18 h par le même autocar et repas à la pizzeria qui nous servait de quartier général. Nous avions appris l'existence de cette pizzeria en écoutant la radio locale (103,3 FM).J’ai même enregistré une cassette de leur publicité.
Nous sommes allés plusieurs fois à SKOPJE et nous allions régulièrement à KUMANOVO sans crainte particulière. Seule la barrière de la langue nous paraissait importante dans les relations avec la population.
  • Sinon le pays, la ville, les habitants ?
Le règlement militaire en vigueur imposait un couvre-feu à 22 h 30 en semaine et 00h00 le samedi soir. Les boîtes de nuit (il y en avait deux à KUMANOVO) n'ouvrant qu'à 23h00. Nous n'avons pas pu voir ces lieux, ni savoir comment s'amuse la jeunesse locale qui ressemble à toutes les jeunesses du monde. (génération Mac Donald, musique occidentale, tenue vestimentaire adaptée, forcément!).
  • Les hommes ?
Bizarres, ils ne regardent pas les femmes, marchent par groupes de trois ou quatre et semblent être dans leur monde ou leur magouille!
  • Les femmes ?
Alors là, c'est différent. Autant les hommes ne font aucun effort de tenue et de comportement, autant les femmes et les filles s'habillent dans la vie de tous les jours comme si elles participaient à des défilés de mode. Tout çà pour notre plus grand plaisir, celui des yeux! Et si les hommes ne regardent pas les femmes, elles, elles nous regardent. Elles n'ont pas l'habitude de la galanterie des militaires français : leur ouvrir une porte, les laisser passer, etc..
  • Avez-vous vu  le président de la République ?
Même pas, nous avions obligation d'être invisible! Heureusement que les tentes ont tenu! Mardi 2 mars, à titre de récompense, nous avons eu droit à une heure et demie de vol en Puma (portes ouvertes) au-dessus de la Macédoine. Impressionnant, c'est un pays qui donne l'impression d'avoir un siècle de retard !
  • Et s'il fallait y retourner ?
Dès que la température extérieure nous permettra de travailler en tenue d'été, sans problèmes!
  • Avez vous appris quelques mots ?
Oui, par exemple: impossible de dire glaçon en macédonien, trou de mémoire en anglais alors: "you know TITANIC? yes! Le geste joint à la parole et voilà des glaçons! YELLOW KETCHUP  pour avoir de la moutarde, etc.. To be 3 pour du tonic. En écriture à l'envers, Tonic s'écrit :"IIIBEIIC. D'où two be three! PIVOT  la bière, DOBRIDEN : bonjour.
  • Photos transmises par Didier GRELIER.



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